Sous les pavés, les mots
Clefs de compréhension des pratiques
de maintien de l’ordre en France
Ce livret a pour objectif de donner l’image la plus juste possible de la situation des manifestations en France en 2023 et des pratiques de maintien de l’ordre. Il explicite les termes utilisés dans le jeu On lâche rien ! mais il peut se lire indépendamment de ce support. Il a été rédigé par l’ACAT-France (Action des chrétiens pour l'abolition de la torture) et la LDH (Ligue des droits de l’Homme).
Présenté sous la forme d’un lexique, ce livret permet des lectures multiples par les liens qu’il propose entre les définitions, les contenus multimédia qu’il met en avant, les renvois vers les sources.
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Bonne lecture !
Banderole
Les banderoles sont un moyen d’expression des revendications des personnes qui manifestent. Elles participent de la liberté d’expression protégée par l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme et par l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.
Il est illégal de retirer des banderoles à des personnes qui manifestent sous prétexte que les bouts de bois qui les maintiennent pourraient être utilisés comme des armes. De même, la pratique policière consistant à conditionner la sortie d’une manifestation au retrait définitif de tout signe exprimant une adhésion associative, syndicale ou pensée politique (autocollants, badges syndicaux, gilets jaunes…) est illégale. Ces pratiques sont malheureusement trop souvent constatées.
Conditionner la sortie d’une manifestation au retrait définitif de tout signe exprimant une adhésion associative, syndicale ou pensée politique, a été constaté maintes fois malgré son illégalité.
— Observatoire parisien des libertés publiques
Sources : citation 1 / texte 1-2
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Blessure
En novembre 2019, un an après le début du mouvement des « gilets jaunes », le ministère de l’Intérieur communiquait un chiffre de 117 personnes blessées suite à l’intervention de la police, toutes opérations confondues.
L’Observatoire des Street-médics a, quant à lui, dénombré les victimes prises en charge par les secours officiels et les street-médics sur la même période. Il a estimé le nombre de personnes blessées à 25 700.
Cette différence s’explique par la méthode de comptage utilisée. Pour les personnes qui manifestent, le ministère ne comptabilise que les prises en charge réalisées par les sapeurs-pompiers et pour des blessures ayant donné lieu à au moins neuf jours d’incapacité temporaire de travail.
Ce manque de transparence dans la méthode de comptage et ce qui la justifie est d’autant plus problématique que lorsqu’il s’agit de dénombrer les blessures chez les forces de l’ordre, celles-ci sont comptabilisées de façon beaucoup plus systématique quels que soient leur type et leur gravité, qu’elles aient engendré un arrêt de travail ou non.
Les armes de force intermédiaire pendant les manifestations créent incontestablement un risque disproportionné pour les personnes qui manifestent.
— Jacques Toubon, Défenseur des droits (de 2014 à 2020)
Dans le documentaire Un pays qui se tient sage, le journaliste et réalisateur David Dufresne interroge le maintien de l’ordre en France et la légitimité de l’usage de la violence par l’État.
— Le Bureau/Jour 2 fête, 2020, 86 minutes
Sources : citation 6 / texte 3-4-5
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Brigade de répression de l’action violente motocycliste
Les brigades de répression de l’action violente motocycliste (BRAV-M ; le qualificatif « motorisée » plutôt que « motocycliste » a été consacré par l’usage) sont formées d’un binôme de policiers et policières sur une moto censée faciliter leur déplacement, notamment là où les véhicules habituels ont du mal à se rendre. Créé en mars 2019 par le préfet de police de Paris et mobilisé pour la première fois lors de l’acte XIX des « gilets jaunes », ce dispositif rappelle les pelotons de voltigeurs motoportés (« les Voltigeurs »), apparus en 1969 et dissous après le décès de Malik Oussekine en 1986.
La présence des BRAV-M en manifestation est source de tensions. Depuis leur création, les BRAV-M ont été mises en cause dans plusieurs affaires de violences.
La hiérarchie ne peut ignorer que la présence des BRAV-M est, de façon presque systématique, source de vives tensions.
— Observatoire parisien des libertés publiques
Le film Nos Frangins de Rachid Bouchareb évoque la nuit du 5 au 6 décembre 1986, au cours de laquelle Malik Oussekine meurt à la suite de l’intervention d’un peloton de voltigeurs motoportés, alors que Paris est secoué par des manifestations estudiantines contre une nouvelle réforme de l’éducation.
— 3B Productions / France 2 Cinéma / Le Pacte / Wild Bunch, 2022, 92 minutes
Sources : citation 7 / texte 7
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Charge d’une manifestation
La charge des forces de l’ordre a pour but de contraindre une foule à quitter des lieux. Cet usage de la force n’est autorisé que lorsqu’il est nécessaire, et le matériel qu’elles utilisent doit être proportionnel à la menace pour elles ou pour l’ordre public.
Avant de charger, les forces de l’ordre doivent avertir les personnes qui manifestent par des sommations (sauf si elles sont attaquées ou si elles ont reçu l’ordre de défendre un lieu ou un bâtiment). Elles peuvent d’abord utiliser du matériel dit « simple » (bâtons, gaz lacrymogène ou lanceurs d’eau) puis, après de nouvelles sommations, utiliser des armes de catégorie supérieure (des grenades ou des lanceurs de balles de défense – LBD).
Dans les faits, le contexte d’une manifestation rend difficilement compréhensibles les sommations pour les personnes qui manifestent ainsi que ce principe de gradation des armes utilisées. De plus, seul un attroupement peut justifier l’ordre de dispersion, selon la loi. Or une manifestation globalement calme n’est pas un attroupement. Mais cette qualification en attroupement est laissée au seul arbitraire des forces de l’ordre.
Ce contexte particulier ainsi que l’usage de certaines armes font que la charge peut souvent être considérée comme non nécessaire ou disproportionnée. De même que le nassage auquel elle est parfois associée, la charge contribue à l’escalade de la violence lors des manifestations
La politique du maintien de l’ordre a eu un effet d’intimidation des manifestant·es conduisant de nombreuses personnes à ne pas manifester par peur des violences policières.
— Observatoire girondin des libertés publiques
Geneviève, une Niçoise de 73 ans, a été victime de violences policières en mars 2019 lors d’une manifestation de « gilets jaunes ». Gravement blessée à la suite d’une intervention musclée et inappropriée des forces de l’ordre, elle a été hospitalisée et est restée sept jours dans le coma. Au micro de Corinne Binestille, elle revient dans « Police, l’ordre à bout de force » sur son histoire à quelques mois du procès qui se déroulera à Lyon.
— Radio Nova, 2022, 20 minutes
Sources : citation 8 / texte 8-11
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Criminalisation des manifestant·es
Délit de dissimulation du visage en manifestation, délit de participation volontaire à un groupement en vue de commettre des violences ou des dégradations, qualification arbitraire des manifestations en attroupements alors qu’il n’y a pas de trouble effectif à l’ordre public : ces infractions contribuent à la criminalisation des personnes qui manifestent, et que la puissance publique considère et traite comme des personnes commettant des délits, sans réelle preuve que ces délits aient été commis.
De plus, l’intervention de policiers ou de policières en civil pour procéder à des interpellations au sein du cortège crée des tensions qui génèrent des « outrages » ou des « rébellions », délits purement réactionnels.
Les manifestants contestataires sont considérés comme des « ennemis » par les forces de l’ordre, qui ne leur appliquent plus le droit mais ont des pratiques arbitraires.
— LDH (Ligue des droits de l’Homme)
En France, ces dernières années, la répression des manifestations est d’une ampleur inédite. De nombreuses personnes manifestant pacifiquement se retrouvent dans le viseur des autorités. « Présumé coupable » part à la rencontre de celles et ceux qui se sont retrouvé·es dans une spirale judiciaire infernale, pour avoir manifesté.
— Amnesty International France, 2020, 48 minutes
Sources : citation 2 / texte 2-9-10
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Drone de surveillance
Les forces de l’ordre sont autorisées depuis 2022 à utiliser des caméras embarquées, des caméras-piétons mais aussi des drones pour surveiller la population, notamment en manifestation, selon leur propre appréciation de la nécessité de surveiller, sans contrôle préalable d’un organe indépendant. Les drones présentent des différences notables avec les caméras de surveillance : ils sont très mobiles et furtifs et peuvent donc être extrêmement intrusifs. Il est par ailleurs très difficile d’informer les gens qu’ils vont être filmés par un drone. De ce fait, les drones ont un effet dissuasif sur les personnes qui manifestent.
Sources : texte 12-13
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Escalade de la violence
L’usage de la force par les forces de l’ordre n’est possible qu’en cas de nécessité. Il doit être proportionné et réversible pour permettre une désescalade des tensions.
Le recours important à des forces non spécialisées pour des missions de maintien de l’ordre (comme les policiers et les policières en civil ou les brigades de répression de l’action violente motocycliste – BRAV-M), l’usage d’armes de force intermédiaire (comme les grenades ou les lanceurs de balles de défense – LBD), ainsi que la criminalisation des personnes qui manifestent contribuent à cristalliser les tensions entre ces personnes et les forces de l’ordre.
Ces pratiques mises en place délibérément par le ministère de l’Intérieur mènent à une escalade de la violence. Elles ont un effet d’intimidation qui conduit de nombreuses personnes à ne pas manifester par peur des violences policières.
Bien loin de concourir à apaiser les tensions et à maintenir l’ordre, le recours systématique aux armes de force intermédiaire est susceptible de générer une escalade de la violence.
— ACAT-France (Action des chrétiens pour l’abolition de la torture)
Contrairement à la plupart des polices européennes, la police française fait souvent preuve de brutalité dans sa gestion des foules protestataires. Cette spécificité récente va à l’encontre du modèle de maintien de l’ordre dont la France s’était jusque-là dotée. Explications en podcast avec Anne Chemin dans « Violences policières : une histoire du maintien de l’ordre “à la française”. »
— L’Heure du Monde, 2022, 19 minutes
Sources : citation 14 / texte 14-15-29
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Forces de l’ordre
En France, il n’existe pas une police, mais des polices. Deux formations sont spécialisées dans la gestion du maintien de l’ordre et interviennent lors des manifestations : les compagnies républicaines de sécurité (CRS) dans la police, et les gendarmes mobiles au sein de la gendarmerie nationale. Ces formations ont plusieurs types de missions : protection, contrôle, surveillance et sécurisation (occasionnellement, interpellation).
Depuis les années 2010, on observe une augmentation des interventions de forces non spécialisées dans le maintien de l’ordre. Ces forces sont employées pour effectuer des interpellations au sein des cortèges, avec un objectif de résultat chiffré clairement affiché par les autorités. Ces interpellations sont génératrices de tensions et accroissent l’emploi de la force au moyen notamment d’armes à létalité réduite, à l’origine de nombreuses blessures.
C’est une volonté politique de faire en sorte que le maintien de l’ordre débouche sur des procédures judiciaires et des condamnations pénales.
— Fabien Jobard, directeur de recherches au CNRS
Les affrontements entre la police et les personnes qui manifestent se sont multipliés en l’espace de quelques années. Avec pour bilan un nombre effarant de personnes blessées, mais aussi des décès. Comment en sommes-nous arrivés là ? Dans Politiques du désordre, Olivier Fillieule et Fabien Jobard établissent le constat implacable de ces régressions successives et les analysent.
— Éditions Seuil, 2020, 304 pages
Sources : citation 18 / texte 16-17
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Gaz lacrymogène
Le gaz lacrymogène est l’arme la plus utilisée dans le maintien de l’ordre. Son utilisation suscite des interrogations car cette arme vise la foule de manière indiscriminée, sans distinguer les personnes qui manifestent de celles qui ne sont pas impliquées dans la manifestation ou qui en rendent compte, comme les journalistes, ni les personnes en bonne santé de celles à la santé fragile. Or, le gaz lacrymogène peut avoir des conséquences aggravées lorsqu’il atteint des personnes vulnérables.
Une utilisation massive de gaz lacrymogène a été observée à l’occasion des manifestations des « gilets jaunes » : des dizaines de milliers de grenades ont été tirées par les compagnies républicaines de sécurité (CRS) durant les manifestations des « gilets jaunes », dont plus de 13 500 pour la seule journée du 1er décembre 2018.
Le 1er décembre 2018, plus de 13 500 grenades lacrymogènes ont été tirées place de l’Étoile à Paris, pour 5 000 à 6 000 manifestants ; nous sommes face à un usage complètement immodéré de la force.
— David Dufresne, journaliste et réalisateur
Sources : citation 21 / texte 8-19-20
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Grenade
Les grenades sont utilisées par les forces de l’ordre afin de disperser un attroupement ou si elles sont attaquées. Il en existe trois types : grenades de désencerclement, grenades lacrymogènes, grenades assourdissantes. Leur emploi est préoccupant car les grenades contiennent des charges explosives et leur fonctionnement génère des éclats à l’origine de nombreuses blessures.
Depuis octobre 2018 et le début du mouvement des « gilets jaunes », plusieurs dizaines de personnes ont perdu un œil, une main ou ont eu une partie du corps mutilée par des lanceurs de balles de défense (LBD) ou des grenades.
La France est le seul pays européen à utiliser des munitions explosives, des grenades contenant du TNT ou un dispositif pyrotechnique lors d’opérations de maintien de l’ordre.
La France est la seule nation d’Europe à utiliser des munitions explosives en opération de maintien de l’ordre.
— Ministère de l’Intérieur
Sources : citation 22 / texte 22-23-24
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Interpellation
Depuis le mouvement des « gilets jaunes », on observe un accroissement du nombre d'interpellations par les forces de l'ordre de personnes qui manifestent ou qui ont l'intention de manifester. Ces interpellations sont suivies la plupart du temps d'un placement en garde-à-vue, généralement sur le fondement du délit de participation volontaire à un groupement en vue de commettre des violences ou des dégradations. Si ce délit permet légalement une interpellation, il est inadmissible qu'il soit invoqué pour empêcher une personne qui n'a commis aucune violence, ni aucune dégradation de bien, de continuer à manifester. Ces interpellations « préventives » sont dénoncées car elles sont détournées de leur finalité : la répression d'une infraction commise.
Le jeudi 16 mars 2023, à Paris, sur les 292 mesures de garde à vue prises en marge de la manifestation contre la réforme des retraites, seules neuf ont donné lieu à des poursuites. Toutes les autres gardes à vue ont été levées sans poursuites. Nous assistons à une utilisation dévoyée de la garde à vue, dont le but est d'intimider les personnes qui manifestent.
Ces pratiques ouvrent la porte à l’arbitraire policier. Elles portent atteinte à la liberté d’aller et venir, à la liberté d’expression et de communication et au droit d’expression collective des idées et des opinions.
Les forces de sécurité intérieure utilisent très abusivement la garde à vue, déclinaison concrète d’une volonté politique de museler la contestation.
— Syndicat de la magistrature
Sources : citation 44 / texte 2-32-43
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Lanceur de balles de défense
L’usage du lanceur de balles de défense (LBD) a été généralisé en France depuis les années 1990 au sein de la police et de la gendarmerie afin de neutraliser des individus à distance. Les agents des forces de l’ordre ne doivent pas viser la tête ou le torse. Ils doivent s’assurer que des tiers sont hors d’atteinte. De plus, chaque tir de LBD est censé être soumis à l’accord d’un autre agent que le porteur ou la porteuse de l’arme pour une meilleure évaluation de la situation d’ensemble et de l’objectif.
En réalité, ces vérifications sont rarement faites, et le LBD est la cause de morts, de lésions neurologiques et de blessures graves. Dans les trois premiers mois du mouvement des « gilets jaunes », une explosion des blessures graves a été constatée : 92 par tirs de LBD dont 14 éborgnages. Au vu de cette situation dramatique, la Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a appelé les autorités françaises à « suspendre l’usage du LBD dans le cadre des opérations de maintien de l’ordre ».
Le Conseil d’État, saisi par la LDH (Ligue des droits de l’Homme), a reconnu la dangerosité de cette arme mais a refusé de suspendre son utilisation. En 2023, le LBD est toujours utilisé par les forces de l’ordre en France.
Les autorités françaises devraient suspendre l’usage du LBD dans le cadre des opérations de maintien de l’ordre.
— Dunja Mijatović, Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe
Sources : citation 25 / texte 8-25-26-27-28
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Maintien de l’ordre
Le maintien de l’ordre est l’une des missions des forces de l’ordre. Il doit avant tout permettre à chacun d’exercer ses libertés fondamentales, et notamment la liberté de manifester, tout en préservant l’ordre et la sécurité publics.
Traditionnellement, le maintien de l’ordre « à la française » reposait sur trois principes fondamentaux : recourir à des forces spécialisées et spécialement formées, éviter les contacts directs entre forces de l’ordre et personnes qui manifestent, faire un usage gradué et réversible de la force.
Dans les faits, cette doctrine n’est plus appliquée depuis 2016 avec notamment l’emploi de forces de l’ordre non spécialisées pour des missions de maintien de l’ordre, l’usage d’armes de guerre et l’emploi de techniques provoquant une escalade des tensions. On peut regretter avec le Défenseur des droits, que la France n’ait pas participé au projet européen GODIAC autour des bonnes pratiques d’encadrement des manifestations politiques en Europe, qui a notamment entraîné dans d’autres pays la mise en place de méthodes de désescalade de la violence, de médiation et de communication avec les personnes qui manifestent.
Les violations des droits humains constatées ne sont pas imputables aux seuls agents, elles ont été permises et favorisées par les choix stratégiques des plus hautes autorités.
— Observatoire girondin des libertés publiques
Sources : citation 14 / texte 15-26
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Manifestation
Forme d’expression politique, la manifestation est un mode d’exercice de la citoyenneté. En France, depuis les années 1970, la manifestation est devenue une forme centrale et quasi institutionnalisée de la participation politique et notamment pour influencer le législateur.
La liberté de manifester est protégée par la Constitution et par des conventions internationales tant qu’elle ne se transforme pas en « attroupement ». Le fait de participer à un attroupement est un délit. En droit français, la définition de l’attroupement est cependant floue et laisse toute latitude aux responsables du maintien de l’ordre pour, après avoir procédé aux sommations légales, permettre l’interpellation et l’usage de la force lors d’un rassemblement de personnes.
Elles et ils étaient plus d’un millier dimanche 8 décembre à demander justice et dignité pour les lycéen·nes agenouillé·es par la police un an auparavant à Mantes-la-Jolie (Yvelines). « Mantes-la-Jolie, 1 an après : “Enfants à genoux, mamans debout” » revient sur une image qui avait fait polémique en pleine contestation contre Parcoursup.
— L’actu des luttes - Radio Parleur, 2019, 8 minutes
Est-ce interdit de filmer les forces de l’ordre ? A-t-on le droit de participer à une manifestation non déclarée ? Peut-on se munir de protection contre les gaz lacrymogènes ? Nos droits en manifestation, fiche à l’usage des personnes qui manifestent, répond à ces questions et plus encore.
— LDH (Ligue des droits de l’Homme), 2023, Fiche triptyque recto-verso
Sources : texte 31-32-45
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Nassage
La nasse ou le nassage est une technique mise au point par les forces de l’ordre pour encadrer le flux des foules pendant les manifestations. Les personnes sont encerclées et ne peuvent plus ni entrer ni sortir de l’espace où elles se trouvent.
Il arrive régulièrement que des cordons de policiers et policières forment, pour un laps de temps donné, un enclos mobile ou immobile au sein duquel évolue la manifestation. Cependant, la nasse peut durer plusieurs heures pendant lesquelles la foule est immobilisée. De plus, on observe en France un usage de la force (gaz lacrymogène, grenades ou charge) sur les personnes encerclées. Cette pratique, violente psychologiquement et physiquement, semble employée à titre de dissuasion de manifester.
La mise en œuvre de la technique de l’encerclement est susceptible d’affecter significativement la liberté de manifester.
— Conseil d'État
Sources : citation 34 / texte 9-30-33-34
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Observateur et observatrice
Toute personne est en droit de filmer, d’enregistrer ou de consigner le déroulement d’une manifestation, y compris les opérations de maintien de l’ordre et les interactions avec les forces de l’ordre.
Les observateurs et observatrices sont des individus ou des groupes qui ne participent pas à la manifestation, dont l’objectif est d’observer et de consigner les actions des forces de l’ordre. La surveillance indépendante de manifestations sur la voie publique est importante car elle permet de documenter, d’alimenter le débat public et d’effectuer des actions juridiques ou des plaidoyers. Les observateurs et observatrices protègent la liberté de manifester.
Bien que les membres des observatoires sous l’égide de la LDH (Ligue des droits de l’Homme) soient systématiquement identifiables en tant que tels, elles et ils sont parfois victimes de gardes à vue, de poursuites, d’amendes, voire de coups et de blessures.
En France, les observateurs ne sont ni reconnus, ni protégés par le droit interne, et sont régulièrement victimes d’atteintes concrètes dans l’exercice de leurs missions.
— La Revue des droits de l'homme
Ne parlez pas de violences policières décrypte les rouages d’une violence d’État, des manifestations des « gilets jaunes » à la mort de Cédric Chouviat. Au sommaire : enquêtes, entretiens et reportages en bande dessinée.
— La Revue Dessinée, 2020, 162 pages
Sources : citation 35 / texte 35
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Policier et policière en civil
Lors des missions de maintien de l’ordre, les forces de l’ordre ne gardent pas leur qualité d’officier de police judiciaire, ce qui signifie notamment qu’elles ne peuvent pas placer une personne en garde à vue.
Depuis la fin des années 2000, le choix a toutefois été fait de faire intervenir des policiers et des policières non spécialement formé·es au maintien de l’ordre et ne portant pas d’uniforme (comme les brigades anti-criminalité – BAC), très autonomes, pour interpeller au sein même de la manifestation, ce qui ne peut manquer de générer de vives tensions et participe ainsi de l’escalade de la violence.
Ces policiers et policières en civil sont censé·es porter un brassard sur lequel figure leur matricule dans le référentiel des identités et de l’organisation (RIO). Dans la pratique, les agents des forces de l’ordre affichent rarement leur RIO et portent parfois des cagoules (pourtant interdites), cachant ainsi leur identité aux personnes qui manifestent et aux organes de contrôle de leur activité. Des observatoires des libertés publiques et des pratiques policières ont pu constater que l’absence de port de RIO est récurrente sans qu’aucune sanction disciplinaire n’ait jamais été prise à ce manquement au code de déontologie de la police et de la gendarmerie.
Un individu qui n’a pas reçu la formation adéquate peut présenter un danger pour la sécurité des personnes, aussi bien celle des manifestants que celle des forces de l’ordre.
— Richard Lizurey, ancien directeur de la gendarmerie nationale
Sources : citation 16 / texte 36-37-38
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Projectile
Canettes, bouteilles d’eau, pavés… Ces objets utilisés comme projectiles sont une expression violente des personnes qui manifestent et s’exerçent à l’encontre des forces de l’ordre. On les qualifie alors d’arme par destination. Même si la résistance à l’oppression est inscrite à l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, ce texte n’est pas compris juridiquement comme donnant le droit à utiliser la violence contre des forces de l’ordre.
Depuis janvier 2022, jeter une canette sur un policier ou une policière peut être puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende, même si cet acte n’a pas entraîné d’incapacité de travail. Le Conseil constitutionnel est resté sourd aux protestations d’associations et de syndicats quant à la disproportion de ces peines au regard de l’acte accompli.
Des « casseurs » parfois présents dans les manifestations sont fréquemment évoqués dans les médias et leur nombre est exagéré, ce qui discrédite les personnes qui manifestent et les revendications qu’elles portent. Toute la manifestation devient alors assimilée à une foule de « casseurs », voire de « terroristes », selon la communication du Gouvernement qui chercher à justifier toutes les mesures répressives exceptionnelles.
J’ai vécu des samedis où cela se passait plutôt bien sur le terrain, et lorsque je rentrais chez moi, le moindre accrochage était amplifié par le gouvernement pour discréditer le mouvement des « gilets jaunes ».
— Vincent, brigadier
Sources : citation 41 / texte 39-40
Voir aussi...
Service d’ordre
Dans certaines manifestations, un service d’ordre est organisé. Il est chargé d’en contrôler le bon déroulement. Même s’il revient en premier lieu aux autorités d’assurer la sécurité des personnes qui manifestent, le service d’ordre contribue également à protéger la liberté de manifester, notamment en cas de heurts avec des personnes mobilisées en contre-manifestation, venues provoquer et intimider les personnes qui participent au cortège.
Sources : texte 42
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Street-médic
Les street-médics (au sens propre « secouriste de rue ») sont des militants et des militantes qui assurent les premiers secours dans les manifestations, au sein desquelles les secours institutionnels (sapeurs-pompiers, service d’aide médicale urgente – SAMU) sont peu présents ou n’interviennent que ponctuellement. Contrairement à ces derniers, les street-médics sont présent·es au sein même des rassemblements durant et à proximité des manœuvres dangereuses des forces de l’ordre, au plus près des personnes qui manifestent et de celles qui sont blessées.
La présence des street-médics dans les cortèges est de plus en plus importante, à mesure que le nombre de personnes blessées augmente. « Panser les plaies et épancher les larmes : une manif’ avec les street medics » est un reportage de Charlotte Perry auprès de celles et ceux qui apportent les premiers secours en cas de blessures graves et soulagent les yeux endoloris par les gaz lacrymogènes.
— Radio France, 2019, 54 minutes